lundi 28 mars 2011

Malte, "Le passage se crée" d'Alain Rohand, "le livre des brèves amours éternelles" de Makine, "le prix à payer" de Fadelle, "Le chant de Malabata" d'Armelle Hauteloire.


Semaines intenses à Malte, au boulot et chez nous. Nombreuses lectures enrichissantes, sentiment de plénitude, et puis ce printemps qui caresse l'idée de s'installer doucettement...

Malte, ses villes en pierre calcaire, en pierre lumière; Malte, son carnaval exubérant et bon-enfant (on ne nous avait pas dit qu'il durait trois jours et trois nuits et que tous les îliens se rendaient à la capitale à cette occasion. Fameuse (dés-)organisation...). Malte, ses innombrables églises aux coupoles généreuses; ses bus jaunes amenés à être supprimés -UE oblige!; son flegme rigide et so British conjugué à l'insouciance méditerranéenne, ses fortifications, ses vestiges néolithiques, ses abris creusés de main et de peur d'homme, sa mer tour à tour rugissante et murmurante, léchant et creusant la roche, créant d'innombrables caches irisées où viennent se recueillir les coraux et les amoureux, Malte la jolie, la convoitée, la fortifiée, à la croisée des chemins et des civilisations, malgré un froid et un vent extrêmes, nous avons aimé te découvrir!
De merveilleuses lectures ont accompagné ces quelques jours de repos et les semaines qui leur ont succédé.
Le passage se crée d'Alain Rohand (AlainX) m'a ému. Les lettres qu'il adresse à ceux qui, volontairement ou involontairement, ont accompagné sa maladie ne laissent pas indifférent. J'en ai eu le coeur et le corps serrés, mais c'est en lisant les lettres adressées à sa mère que les larmes se sont libérées. Sans m'en rendre compte, j'ai traversé son expérience avec mon regard et ma sensibilité de mère, une mère qui a aussi connu des angoisses et des souffrances rentrées pour les siens. Je l'admire d'avoir écrit ce témoignage, comme je l'admire d'avoir choisi la porte du courage, celle de la normalité, alors qu'il aurait aussi bien pu choisir de franchir à jamais la porte de la différence et de l'handicap. Merci Alain pour cet écrit qui remet en question et permet de relativiser nos propres expériences.
Il fut suivi par le Livre des brèves amours éternelles d'Andrei Makine, dont le titre me séduisait autant que l'enthousiasme de Mathéo. Je n'ai pas été déçue. Par petites touches, l'auteur dépeint avec une exquise délicatesse les ombres mais surtout les quelques rais lumineux qui ont enrichi sa jeunesse d'orphelin communiste parfaitement endoctriné mais finalement pas tant que ça parce que toujours humain, parce que sensible au tremblement d'une lèvre, au battement d'une paupière, aux vibrations de l'attente, à l'éternel qui se révèle non pas dans l'étreinte mais dans sa signification. Cette subtile révélation en fait l'humain qu'il est devenu, une découverte pour moi.
Ma tournante de livres m'a attribué Le prix à payer de Fadelle dont on a déjà beaucoup parlé. Je ne l'aurais pas choisi: encore une conversion un peu gnangnan... mais comme je l'avais sous la main, c'était le moment de l'ouvrir. Je ne l'ai plus refermé. Ce témoignage actuel et sans fioritures est d'une force et d'une humanité difficiles à concevoir. Il vous met face à vos engagements, quels qu'ils soient; il vous met face à la vérité, celle qui habite tout homme et qu'il a le devoir de chercher ; il vous confronte au courage et à l'amour, il vous rappelle aussi que vous êtes peu de choses et unique à la fois. Après avoir combattu contre tous, y compris ses frères, il a encore un combat à livrer, cette fois contre lui-même. Le pardon serait-il le prix de la paix?
"Le Chant de Malabata" (couronné par l’académie française) d'Armelle Hauteloire berce mes soirées de son air mélodieux. Est-ce la proximité des mots ou leur musicalité qui génèrent un sens nouveau et m’entraînent dans cette chanson de geste d'un autre âge mais de tous les âges. C’est l’histoire mille fois vécue d’un homme et d’une femme. Armelle réussit le prodige de la transfigurer et toutes ces vies, toutes ces histoires deviennent l’Histoire de l’Homme et de la Femme. Les mots me manquent pour dire mon admiration. Heureusement, d’autres l’ont fait avant moi qui ont reconnu les qualités de ce chant exceptionnel et comparable au « cantique des cantiques » « avec des accents neufs, plus intime encore » (Jean Guitton)

15 commentaires:

  1. Ce que tu dis, Delphine, à propos de mon livre, me touche beaucoup. en particulier ton émotion de mère. Les enfants ne réalisent pas tout ce qu'une mère doit endurer parfois.
    Quant au courage, c'est vrai. Et en même temps, il fallait bien que je m'en sorte…
    Il y a beaucoup de courageux de par le monde. Ils mériteraient une reconnaissance qu'ils n'ont pas toujours, loin de là.

    un grand merci pour cet écho de ta lecture. Cela m'est précieux. Beaucoup même.

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  2. Merci Delphine. Où peut-on se procurer le livre d'AlainX? J'ai essayé Amazon, sans résultat, mais il est vrai que je ne suis pas en Europe.
    Quant à Malte...es-tu allée à Gozo? C'est chouette Gozo, un peu à mi-chemin entre...on ne sait pas trop quoi. Un peu comme Malte, réflexion faite.

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  3. Alain: c'est un plaisir pour moi. Tu as raison, le courage est souvent méconnu, mais il nous grandit et c'est ce qui compte.

    Flo: pour acheter quel livre?

    Damien: sur le site d'AlainX, tu cliques sur le livre à droite du texte. Nous avons visité Gozo bien sûr, malheureusement en groupe organisé (un peu compliqué de profiter de tout sans voiture). J'ai trouvé l'île très différente de Malte: plus verte, plus authentique, plus naïve aussi. J'aurais bien voulu m'arrêter à Comino, mais le Ferry ne faisait pas escale... Un vrai no-man's land entre les deux îles.

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  4. Je confirme que le livre d'Alainx est plein d'une profonde humanité. Je fus émue plus d'une fois en le lisant (et en en faisant la relecture avec lui, puisque j'ai eu cette chance...)

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  5. Delphine, tu as toujours un goût sûr, que ce soit dans tes musiques, lectures ou lieux de voyages... en tout cas je me sens toujours à l'aise si je veux suivre tes conseils.

    Le livre d'Alain ... naturellement! Malte, aussi, un jour ...

    Edmée

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  6. Coumarine: c'est une très belle aventure qu'il t'a été donné de vivre là!

    edmée: Tu me flattes là! Et moi qui n'ai pas encore commandé Sybilla! Prochaine lecture! (tu vois, j'ai un goût très très sûr :-))
    A très bientôt!

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  7. Mon commentaire a disparu, Blogger nous joue des tours en ce moment!
    Je t'ai envoyé un mail pour te dire que je pense à toi très fort, et que j'aime ton écriture lumineuse comme le ciel de malte.
    Bises
    Célestine

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  8. Merci Delphine de ce que vous dites de mon " Chant de Malabata", poème de mes trente ans où je publiais encore sous le pseudonyme Hauteloire. D'autre part je comprends le plaisir que vous avez pris à Malte qui est une île magnifique. Je ne savais pas que s'y déroulait un grand carnaval.

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  9. J'etais certain que tu aimerai Delphine.
    Je vous souhaite à tous un excellent week-end.
    Bisous

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  10. Ah, chouette! Je me demandais si tu aimerais les îles de Malte (c'est vrai, on pense souvent qu'il n'y en a qu'une!) Peut-être Chenapan a-t-il même pêché quelques pulpos?
    Besos.

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  11. Cel:merci, j'ai bien reçu ton gentil mail.C'est curieux, tous les matins, nous contemplions le ciel qui était bleu intense et la vague déchaînée et transparente. Au fil des heures, les nuages arrivaient et recouvraient tout, mangeant l'intensité et la luminosité. Nous nous sommes fait prendre au début, mais avons vite appris à bien nous couvrir!

    Flo: Merci. Sûre que tu as scotché tes amis avec tes petits poissons tout mignons!

    Armelle: Malte est en effet très belle, mais semble devenir de plus en plus touristique. Comme elle n'est pas grande, aucun endroit n'est épargné, malheureusement... pour votre "Chant", ne me remerciez pas, c'était -et ce sera encore- une plongée dans une vague de lumière et de chaleur, un doux réconfort pour le coeur et l'esprit.

    Math: encore merci pour la référence! Et bonne fin de week-end!

    Colo: Bien sûr, un beau moment, sans les enfants. Chenapan donnait le biberon aux agneaux délaissés et gambadait avec eux pendant ce temps!
    Et toi, qu'en as-tu pensé?
    Colo

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  12. Sentiment de plénitude... Cela se ressent en lisant ce billet de découvertes rondement mené dont on ne veut pas manquer une ligne.
    Les mots te manquent ? Non, non, ils sont tous là, et le message passe parfaitement.

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  13. Tania: c'est vrai qu'il est rondement mené, trop sans doute. Chaque livre mérite à lui seul plus d'un billet mais oh, je souhaitais parler de tous à la fois et puis, crainte de ne plus le faire par la suite...
    Bon retour parmi nous, chère Tania.

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