vendredi 18 février 2011

Quel cirque cette foire (du livre)!

Aujourd'hui, foire du livre! Le vendredi, on évite la foule des soirs et des weekend... En plus j'ai appris que Coumarine dédicaçait ses livres de une à deux, plus aucune hésitation possible. En métro, c'est plus simple, sans doute plus rapide et puis un peu de marche ne me fera pas de mal.
Me voilà assise à la seule place encore disponible dans la rame. Hé, ils ont rétréci les places, qu'est-ce qu'on est serré! Je sens la fesse de ma voisine déborder sur ma cuisse, j'aime pas trop. Puis je me rends compte qu'elle est énorme et occupe son siège et la moitié du mien. Sa graisse déborde un peu plus sur moi, punaise, ça ne me plaît absolument pas, je n'arrive même pas à lire le journal tellement elle m'étouffe. J'essaie de relativiser. La pauvre, elle n'y peut rien, elle doit se sentir encore plus mal que moi... Enfin j'imagine. Ses copines -des marocaines- hurlent des histoires de mecs; elle écoute et intervient rarement. Les hurleuses ne regardent pas trop cette voisine pourtant bien visible. Mes pensées vagabondent et mon regard se pose sur un homme qui éternue bruyamment. La morve jaillit de son nez tel un volcan en éruption. Beurk, mais qu'est-ce que je fous là? J'en suis à me demander si je suis une extra-terrestre, quand un homme, un Congolais je crois bien, me réconcilie avec l'humanité: il cède sa place à un couple de personnes âgées. Tout simplement. Mais dans cette cohue et ce manque de respect, c'est beau. C'est nécessaire.
Dix minutes de marche. Je suis perdue, mon sens de l'orientation renommé (hum!) ne me dit pas si je dois remonter le boulevard ou le descendre. Je ne me sens pas très à l'aise dans ce quartier. Heureusement Paris m'a appris comment éviter les dingues, les dangereux, les sales types qui te plantent leur truc dégueulasse dans le dos, les pickpockets et tous les autres aussi. Tu ne regardes personne dans les yeux, tu te colles à la paroi du métro, tu es très affairée, tu sais où tu vas et tu te déplaces rapidement. Si t'as l'air d'une touriste ou si tu joues les midinettes, c'est foutu. Ouais, mais là, je ne sais pas dans quelle direction aller et j'ai franchement pas envie de me paumer... Bon, je finis par demander mon chemin dans une boutique et je fonce sans accroc jusqu'à la foire.
Vendredi, foire tranquille? tu paaarles! Et les écoles alors? J'arpente, je regarde, je feuillète, y a trop de trop. L'agencement des stands me semble totalement illogique, les baffles hurlent les discours des intervenants, trop de bruit, des caméras et des journalistes à éviter partout, baisser la tête, se détourner, éviter des gamins qui galopent à la recherche de cadeaux gratuits, se faire haranguer comme au marché, c'est trop. Je regrette d'être venue. Cette commercialisation du livre me déplaît. Profondément.
Je me fais aborder par un homme d'un certain âge au regard très bleu, il agite un bouquin, "Un sac de billes". Je regarde les livres éparpillés devant lui: Joseph Joffo encore et encore. Et si? mais oui, c'est bien lui, le héros de ma jeunesse. J'ai dû lire le "sac de billes" pas moins de cinq fois, d'autres de ses romans ont enchanté mes jeunes années. Nous entamons une discussion sympa, je crois bien que je le regarde avec les yeux émerveillés de l'enfance. Il me complimente, un peu trop, nous rions, je finis par lui acheter des bouquins qu'il me dédicace de sa plume nerveuse.
Un peu plus loin, je me fais apostropher par un gars qui essaie de me vendre sa BD. Lorsqu'il lit les titres que je tiens à la main, son expression passe de joviale à désagréable: "si vous lisez ce type, vous ne pourrez apprécier ma BD", me lance-t-il. "Et pourquoi ne pourrais-je apprécier les deux?". "Ce bandit? Jamais!". Interloquée, je quitte le stand, la reconnaissance que j'éprouvais pour ces belles retrouvailles avec mon enfance faisant place à un sentiment plus lourd... Rentrée à la maison, je fais une recherche sur la toile: je devais bien être la dernière à ignorer que Joffo n'a pas écrit seul ses livres... Quelle déception! En même temps, je ne peux oublier qu'il a enchanté mes jours et mes nuits et ça, ce n'est pas rien!
Mais Coumarine m'attend, j'abandonne une BD en pleine dédicace pour courir au stand que j'avais pris la peine de repérer, elle est bien là! Comme dans mon souvenir, comme dans ses écrits, simple et généreuse, disponible, spontanée, intelligente et sensible. Un très beau moment pour lequel je la remercie, beaucoup.
Elle a réussi à éclairer cette journée teintée de gris et à lui donner son sens. Et moi je me suis sentie enrichie, grandie.
Pour ça, tout ce cirque vaut la peine!

15 commentaires:

  1. oh! Delphine... pour moi, ce fut un très bon moment, que j'ai voulu "sauver" des autres personnes qui te et me harponnaient...
    Je voulais pouvoir TE parler et T'écouter toi toute seule, et on en a eu l'occasion
    C'est moi qui te remercie de ta présence chaleureuse... elle m'a fait du bien, sache-le!

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  2. Dis moi je suis tout essoufflé par ton aventure souterraine, et j’ai failli ne pas garder mon petit déjeuner avec ton gars a l’éternuement généreux.
    J’ignorais que Joffo n’écrivait pas seul et je partage ta déception.
    Enfin ton parcours de la combattante finit au mieux et ça me fait plaisir de savoir que vous avez vécu un moment précieux…
    Bises et amitiés à Amaury.
    Math

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  3. Tu es courageuse, Paris seule, le métro ... la petite provinciale que je suis n'aime pas. Pour Joffo, je ne savais pas. Il était venu il y a 2 ans faire une conférence et j'y avais trainé (c'est le mot) mes fils. J'avais d'abord été 'fascinée' par la manière dont il racontait, dont il intéressait tous les jeunes présents et puis ça avait tourné en foire mercantile et ça m'avait fortement déplu ! D'un autre coté, il ne s'était pas déplacé aux Pays Bas pour des clopinettes ! Comme toi j'ai du lire un sac de billes au moins 5 fois :))
    MS

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  4. Eh bien !
    Quelle aventure ce salon…
    Heureusement qu'à la fin il y avait une sorte d'apothéose !

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  5. Je suis très très surpris par la deuxième partie de ton article. Je viens de rentrer de la Foire du Livre de Bruxelles où j'ai passé une délicieuse après-midi, comme chaque année. Je m'y sens comme un poisson dans l'eau, et vais d'un débat à une séance de dédicaces en passant par la découverte de nouveaux livres, auteurs, maisons d'éditions. Chaque année, il y a aussi des surprises auxquelles je ne m'attends pas (comme rencontrer par hasard Coumarine en 2010), et ce fut encore le cas cet après-midi. Je reviens des étoiles dans les yeux, et si j'habitais en région bruxelloise, je crois que j'y passerais volontiers tous les jours! Nous avons une chance incroyable en Belgique de pouvoir y voir et parler avec de très nombreux auteurs et personnalités.

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  6. Quel voyage! Il ne faut pas aller loin pour se sentir perdue, n'est-ce-pas? Quelqu'un avait surnommé le salon du livre et de la presse à Genève, le 200ème pays.
    (N.B) -- Je réponds bien vite à ton mail-- stop -- assez débordé -- A bientôt.

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  7. Magnifique billet, un peu différent de ce que tu fais d'habitude! J'ai adoré ta description du métro, bien connue aussi naturellement. La promiscuité forcée des mondes, races et éducations.
    Atchoum!
    Et puis le baratin-livres!

    Merci Delphine!

    Edmée

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  8. Coumarine: J'espère que la suite se passe tout aussi bien. En lisant ce billet, une de mes lectrices silencieuses m'a demandé de lui prêté tes livres :-)

    Math: désolée pour le petit déjeuner! J'ai peut-être exagéré, mais j'avoue que la sécurité s'est fort déteriorée à Bruxelles malheureusement. La station de métro où je suis descendue venait d'être victime d'une nouvelle agression. Ce n'était pas le no man's land qu'on trouve déjà dans d'autres quartiers de la ville, mais disons que je m'y sentais étrangère.

    ms: Je crois bien que nous partageons beaucoup de lectures similaires, pas seulement Joffo. Il semble que le "scandale" est arrivé l'année passée lorsque je ne sais plus qui a publié un bouquin sur les nègres et leur collaboration avec nombre de personnalités. Je pensais à toi justement car il y avait un encart dans le fameux journal que j'ai à peine déplié, parlant du nombre de jeunes néerlandais inscrits dans les écoles flamandes: trop de laxisme aux PB...

    AlainX: c'est tout à fait ça, une apothéose! Livre commandé!

    PB: Je comprends ton sentiment, mais à dire vrai, je préfère rencontrer ces personnes dans un cercle plus restreint, si ça m'est donné bien entendu. Et si je te dis que j'adore la librairie Shakespeare & Co à Paris, qui est une espèce d'antre sombre qui sent le tabac et le café et le vieux papier, où les livres s'entassent en piles aproximatives, où vous taillez une bavette autant de temps que vous le souhaitez et où vous dénichez toujours tout ce que vous cherchez, tu comprendras que j'aime moins le feu des projecteurs de la Foire. Mais je pense que pour l'auteure que je serai un jour dans mes rêves, elle peut être utile pour nouer les premiers contacts. As-tu rencontré toutes les personnes que tu souhaitais y voir?

    Damien: pardonne mon manque de culture, mais je ne saisis pas trop l'allusion au 200ème pays. Un sens caché qui m'échappe ou une énormité que je devrais connaître? No stress pour le reste.

    Edmée: sans doute l'atmosphère du métro qui m'a inspirée autrement. A propos, où en es-tu de tes cartons, à les emballer ou à les déballer? J'aimerais te rencontrer une prochaine foire du Livre.

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  9. Très surprise de ne ps trouver mon commentaire d'hier...la toile me l'a mangée... je te parlais de mon envie de me retrouver dans ce métro avec toi, et de partager ces moments avec Coumarine en riant comme des collégiennes...Je n'ai pas le courage de réécrire mon comm. ce soir.
    je t'embrasse.
    Célestine

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  10. Cel: aussi désolée que toi, tu penses, mais je t'assure que je n'ai pas vu le moindre message de ta part poindre au coin de mon écran... Ca va se faire non? Tu ne comptais pas passer par ici?
    Bisous

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  11. Réponse à Delphine : oui, trois belles rencontres. D'abord, Colette Nys-Mazure par hasard dans les allées ; elle me reconnaît (on s'est déjà vus trois fois), vient m'embrasser et me remercier de parler d'elle sur mon blog ; très touchant. J'ai ensuite assisté à la présentation de poètes belges qu'elle faisait avec Christian Libens. Ensuite, rencontre avec Luc Beyer de Ryke que j'avais déjà eu au téléphone. Il m'annonce une grosse surprise : il me cite dans son dernier essai sur la Belgique. C'est une belle reconnaissance pour mon travail. Enfin, rencontre avec la princesse Esméralda de Belgique avec qui je suis régulièrement en contact par courrier mais on ne s'était jamais vus en "vrai". Bref, quelques heures très enrichissantes.

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  12. J'aime beaucoup me retrouver dans le métro, au milieu de cette faune humaine. Faut dire que je ne l'utilise qu'à l'occasion. J'habite jors de la grande ville et n'y travaille pas alors... je choisis mon temps.

    Cependant, le salon du livre, j'aime moins. À quoi ça sert de voir tous ces livres alors qu'on ne peut les lire? Au salon du vélo ou à celui de l'auto, même si je n'y vais pas, on voit les objet, on touche à ces derniers mais un livre, ça se lit. À moins de vouloir rencontrer les auteurs bien sûr mais là, je préfère les rencontrer en d'autres circonstances.

    Cependant, si j'étais à la retraite, j'irais y passer mes après-midi, pour assiter aux conférences, pour parler avec les auteurs pendants les heures creuses, comme vous le faites!

    Accent Grave

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  13. Amusant, instructif et bien écrit.

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  14. Oh Delphine ! Que racontes-tu là ? Ce n'est pas ça Bruxelles ! c'est pas possible ! même dans le métro ! Je te dirais que lorsque je pouvais encore aller à Paris, je ne prenais pas le métro. Le bus ou le taxi ou encore la marche à pied !
    Il y a combien de temps que tu as été dans ta librairie parisienne ? Car plus un établissement quel qu'il soit sent le tabac depuis l'interdiction de fumer ! Tout le monde en France fume dans la rue !!!!
    En attendant, même si je le pouvais, je n'irais pas à la foire du livre de Bruxelles avec toi ! Na !
    Gros bisous Delphine ! Je retourne voir mes chats !
    Florence

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